Maria Jebli Cheville : « Mai à vélo, c’est le vélo pour la vie… et pour la vie ensemble »

À l’occasion de la 5ème édition de Mai à vélo, AVELO a rencontré Maria Jebli Cheville, présidente du programme depuis 4 ans et maire adjointe à Chartres, en charge de l’éco-ville. Elle partage avec nous sa vision de ce temps fort national et les actions concrètes que chacun peut engager : citoyen, entreprise ou acteur de l’écosystème vélo.

Quelle est l’ambition de Mai à vélo ?

M.J.C. : C’est un moment festif et national pour faire (re)découvrir le vélo, et plus largement faire émerger une culture vélo accessible à tous. Comme la fête de la musique, on veut que Mai à vélo devienne un rendez-vous annuel, joyeux et fédérateur. Le message est simple : le vélo pour la vie.

Quels chiffres retenir de l’édition 2024 ?

Maria – à gauche- lors du lancement de Mai à vélo fin avril 2025 au salon Vélo In Paris.

M.J.C. : Nous avons comptabilisé 5 090 événements, dont 2 020 en présentiel (balades, animations…) et 3 070 challenges d’activité via Geovelo. Plus de 180 000 participants ont pédalé collectivement près de 9,8 millions de kilomètres.

Côté organisateurs : 23 % de collectivités, 33 % d’employeurs, 38 % d’associations, et 5 % d’établissements scolaires. Et une couverture complète : métropole et DROM-COM. C’est toute la richesse de Mai à vélo.

Mai à vélo, un programme pour tous ?

M.J.C. : Oui, vraiment. Peu importe le vélo, classique ou électrique. Ce qui compte, c’est de pédaler, respirer, bouger. Pas de catégories, pas de hiérarchie. On fait du vélo, point.

Mais il faut rester vigilant : l’usage du vélo reste souvent réservé aux CSP+. L’électrique peut exclure, notamment par son coût. Il faut travailler sur l’accessibilité et viser une pratique inclusive : pour les jeunes, les femmes, les aînés, les zones rurales…

Youpi a toujours aimé faire du vélo.
Il le clame haut et fort.

Et en 2025, quels objectifs et nouveautés ?

M.J.C. : Nous visons 6 000 événements, et a priori, l’objectif est atteint et même dépassé ! La mobilisation est croissante. On a aussi innové cette année :

  • Lancement d’une chaîne SoundCloud avec des spots de sensibilisation ;
  • Une journée “Vélo & Influence” au ministère des Transports ;
  • Une matinée vélo au Parlement européen ;
  • Distribution du magazine Youpi Doc dans les écoles ;
  • Un événement de lancement réussi à Vélo in Paris, marqué par une forte présence du handivélo.

Et pour animer les territoires, nous avons envoyé 454 banderoles et 30 500 cartes postales à colorier. L’idée : faire du vélo une fête accessible, colorée, populaire.

Et vous, quel rapport personnel au vélo ?

Une parade à vélo sous le soleil printanier. Crédit Photo Weelz!

M.J.C. : C’est simple : je me sens mieux à vélo. Moins stressée, plus libre. Voilà des constats personnels. Je roule presque exclusivement à vélo, même si je possède encore une voiture… que j’ai utilisée à peine 2 000 km l’an dernier. Je ne suis pas prête à la vendre, mais je m’interroge. Le vélo, c’est un cheminement personnel.

Notre rôle, en tant qu’élus, ou quand on est impliquée dans ce programme Mai à Vélo, c’est justement de rendre ce chemin possible pour chacun, en levant les freins, en créant les conditions.

Pour revenir à un constat personnel, ce qui est certain, quand je me déplace à vélo, je me sens bien. Moins stressée. Apaisée. Et je le constate, au volant de ma voiture, je suis comme beaucoup de français, stressée, pressée, énervée.

Pourtant, être stressé, pressé, énervé n’est pas l’apanage des automobilistes. Les cyclistes ne sont pas toujours exemplaires…

M.J.C. : Loin de là. Et je le répète, je ne suis pas là pour opposer les uns avec les autres. Je ne crois pas que le simple fait de pédaler nous rendent tous et toutes des modèles de vertu ! D’ailleurs, il faut oser le dire : le simple fait de se déplacer à vélo ne rend pas automatiquement vertueux. Je vois beaucoup trop de cyclistes qui ont des comportements dangereux, égoïstes. Le rôle de Mai à vélo est aussi là : porter un message fort de partage de la route, de vivre ensemble, de bienveillance. Aucun de nous n’est infaillible. Mettons dans nos déplacement de l’indulgence, de l’écoute, de l’empathie envers les autres usagers.

Pédaler librement. Crédit photo Weelz!

Quels sont les leviers d’action pour une mobilité plus vertueuse, même à vélo ?

M.J.C. : Commencer à vélo, ou y revenir. Même un peu. Découvrir que ce n’est pas si compliqué. Lever les freins mentaux — la peur, la météo. Et adopter une posture citoyenne. Le vélo, c’est un style de vie, mais aussi une façon d’habiter le monde. Il faut l’assumer avec humilité.

Revenons à Mai à vélo, Quel rôle pour les entreprises ?

M.J.C. : Un rôle clé. Elles peuvent relayer Mai à vélo, organiser des défis, mettre en place des infrastructures, et accompagner leurs salariés dans la pratique.

C’est bon pour le climat, mais aussi pour la qualité de vie au travail. Et souvent, ceux qui essaient… adoptent. J’ai l’exemple d’un promoteur immobilier, peu cycliste à la base, qui a vendu sa voiture à la retraite et acheté deux VAE. Le déclic existe. Parfois, le déclic arrive tard. Ce n’est jamais trop tard.

Même question pour l’industrie du vélo ?

M.J.C. : Mai à vélo est aussi une opportunité économique. Avec 9 millions de kilomètres parcourus, l’intérêt est là : test produits, partenariats, visibilité locale. Il faut aller plus loin : que ce rendez-vous annuel devienne aussi un relais pour l’ensemble de la filière économique du vélo. Elle doit se l’approprier encore mieux.

Mai à vélo pourrait-il dépasser les frontières ?

M.J.C. : Pourquoi pas ! Aujourd’hui, c’est une initiative 100 % française. Mais comme la fête de la musique, on peut imaginer une dimension européenne. J’en parle au Parlement européen. L’idée d’un “Mai à vélo” mondial ne me paraît pas utopique. Le vélo est un levier pour la santé publique, le climat, l’économie locale.

Modernisons notre communication, adressons-nous aux jeunes. Renforçons l’esprit communautaire, créons plus d’interactions dans nos outils. C’est la 5ème édition de Mai à Vélo, il y a encore beaucoup à faire.

Un dernier mot ?

M.J.C. : Oui ! Ne soyons pas dogmatiques. Je ne suis pas anti-voiture. Je suis pragmatique. En France, que ça plaise ou non, il y a un enjeu autour de la place de la voiture dans l’imaginaire et dans l’espace public. Et pour cela, parfois, il faut passer par la contrainte. C’est un discours difficile à entendre, mais nécessaire. Au-delà, si vous ne deviez retenir qu’une chose de cet échange, c’est celui-ci : Le vélo pour la vie, et le vélo pour la vie ensemble. C’est notre boussole en ce mois de mai 2025 !


📍 Pour participer, organiser un événement ou rejoindre un challenge Mai à vélo, rendez-vous sur maiavelo.fr